Nomenclature Dintilhac
Découvrez ci-dessous un extrait du rapport du groupe de travail dirigé par Jean-Pierre DINTILHAC, Président de la deuxième chambre civile de la Cour de cassation et chargé d’élaborer une nomenclature des préjudices corporels.
Celle-ci est bien évidemment importante dans le processus d’indemnisation des dommages corporels suite à un accident.
A – Victime Directe – Nomenclature des préjudices corporels
1°) Préjudices patrimoniaux
a) Préjudices patrimoniaux temporaires (avant consolidation)
Dépenses de santé actuelles (D.S.A.)
Frais Divers (F.D.)
Il concerne notamment les honoraires que la victime a été contrainte de débourser auprès de médecins (spécialistes ou non) pour se faire conseiller et assister à l’occasion de l’expertise médicale la concernant, les frais de transport survenus durant la maladie traumatique, les dépenses destinées à compenser des activités non professionnelles particulières qui ne peuvent être assumées par la victime directe durant sa maladie traumatique (frais de garde des enfants, soins ménagers, assistance temporaire d’une tierce personne pour les besoins de la vie courante, etc.).
Pertes de gains professionnels actuels (P.G.P.A.)
L’évaluation judiciaire ou amiable de ces pertes de gains doit être effectuée in concreto au regard de la preuve d’une perte de revenus établie par la victime jusqu’au jour de sa consolidation.
b) Préjudices patrimoniaux permanents (après consolidation)
Dépenses de santé futures (D.S.F.)
Frais de logement adapté (F.L.A.)
Frais de véhicule adapté (F.V.A.)
Assistance par tierce personne (A.T.P.)
Elles visent à indemniser le coût pour la victime de la présence nécessaire, de manière définitive, d’une tierce personne à ses côtés pour l’assister dans les actes de la vie quotidienne, préserver sa sécurité, contribuer à restaurer sa dignité et suppléer sa perte d’autonomie.
Pertes de gains professionnels futurs (P.G.P.F.)
Incidence professionnelle (I.P.)
Cette incidence professionnelle à caractère définitif a pour objet d’indemniser les incidences périphériques du dommage touchant à la sphère professionnelle comme le préjudice subi par la victime en raison de sa dévalorisation sur le marché du travail, de sa perte d’une chance professionnelle, ou de l’augmentation de la pénibilité de l’emploi qu’elle occupe ou encore du préjudice subi qui a trait à sa nécessité de devoir abandonner la profession qu’elle exerçait avant le dommage au profit d’une autre qu’elle a du choisir en raison de la survenance de son handicap.
Ce poste de préjudice cherche également à indemniser la perte de retraite que la victime va devoir supporter en raison de son handicap, c’est à dire le déficit de revenus futurs, estimé imputable à l’accident, qui va avoir une incidence sur le montant de la pension auquel pourra prétendre la victime au moment de sa prise de retraite.
Préjudice scolaire, universitaire ou de formation (P.S.U.)
Ce poste intègre, en outre, non seulement le retard scolaire ou de formation subi, mais aussi une possible modification d’orientation, voire une renonciation à toute formation qui obère ainsi gravement l’intégration de cette victime dans le monde du travail.
2°) Préjudices extra-patrimoniaux
a) Préjudices extra-patrimoniaux temporaires (avant consolidation)
Déficit fonctionnel temporaire (D.F.T.)
Ce poste de préjudice cherche à indemniser l’invalidité subie par la victime dans sa sphère personnelle pendant la maladie traumatique, c’est à dire jusqu’à sa consolidation.
Elle va traduire l’incapacité fonctionnelle totale ou partielle que va subir la victime jusqu’à sa consolidation. Elle correspond aux périodes d’hospitalisation de la victime, mais aussi à la “perte de qualité de vie et à celle des joies usuelles de la vie courante” que rencontre la victime pendant la maladie traumatique (séparation de la victime de son environnement familial et amical durant les hospitalisations, privation temporaire des activités privées ou des agréments auxquels se livre habituellement ou spécifiquement la victime, préjudice sexuel pendant la maladie traumatique, etc.).
Souffrances endurées (S.E.)
Préjudice esthétique temporaire (P.E.T.)
Il a été observé que, durant la maladie traumatique, la victime subissait bien souvent des atteintes physiques, voire une altération de son apparence physique, certes temporaire, mais aux conséquences personnelles très préjudiciables, liée à la nécessité de se présenter dans un état physique altéré au regard des tiers.
Or ce type de préjudice est souvent pris en compte au stade des préjudices extra-patrimoniaux permanents, mais curieusement omis de toute indemnisation au titre de la maladie traumatique où il est pourtant présent, notamment chez les grands brûlés ou les traumatisés de la face.
Aussi, le groupe de travail a décidé d’admettre, à titre de poste distinct, ce chef de préjudice réparant le préjudice esthétique temporaire.
b) Préjudices extra-patrimoniaux permanents (après consolidation)
Déficit fonctionnel permanent (D.F.P.)
Il s’agit ici de réparer les incidences du dommage qui touchent exclusivement à la sphère personnelle de la victime. Il convient d’indemniser, à ce titre, non seulement les atteintes aux fonctions physiologiques de la victime, mais aussi la douleur permanente qu’elle ressent, la perte de la qualité de vie et les troubles dans les conditions d’existence qu’elle rencontre au quotidien après sa consolidation.
Préjudice d’agrément (P.A.)
Ce poste de préjudice vise exclusivement à réparer le préjudice d’agrément spécifique lié à l’impossibilité pour la victime de pratiquer régulièrement une activité spécifique sportive ou de loisirs.
Ce poste de préjudice doit être apprécié in concreto en tenant compte de tous les paramètres individuels de la victime (âge, niveau, etc.).
Préjudice esthétique permanent (P.E.P.)
Préjudice sexuel (P.S.)
Le préjudice morphologique qui est lié à l’atteinte aux organes sexuels primaires et secondaires résultant du dommage subi
Le préjudice lié à l’acte sexuel lui-même qui repose sur la perte du plaisir lié à l’accomplissement de l’acte sexuel (perte de l’envie ou de la libido, perte de la capacité physique de réaliser l’acte, perte de la capacité à accéder au plaisir)
Le préjudice lié à une impossibilité ou une difficulté à procréer
Là encore, ce préjudice doit être apprécié in concreto en prenant en considération les paramètres personnels de chaque victime.
Préjudice d’établissement (P.E.)
Ce type de préjudice doit être apprécié in concreto pour chaque individu en tenant compte notamment de son âge.
Préjudices permanents exceptionnels (P.P.E.)
Ainsi, il existe des préjudices extra-patrimoniaux permanents qui prennent une résonnance toute particulière soit en raison de la nature des victimes, soit en raison des circonstances ou de la nature de l’accident à l’origine du dommage.
c) Préjudices extra-patrimoniaux évolutifs (hors consolidation)
Préjudices liés à des pathologies évolutives (P.EV.)
C’est un chef de préjudice qui existe en dehors de toute consolidation des blessures, puisqu’il se présente pendant et après la maladie traumatique. Tel est le cas du préjudice lié à la contamination d’une personne par le virus de l’hépatite C, celui du V.I.H., la maladie de Creutzfeldt-Jakob ou l’amiante, etc.
B – Victime indirecte – Nomenclature des préjudices corporels
1°) Préjudices des victimes indirectes en cas de décès de la victime directe
a) Préjudices patrimoniaux
Frais d’obsèques (F.O.)
Ces frais font l’objet d’une évaluation concrète fondée sur une facture établie en bonne et due forme.
Pertes de revenus des proches (P.R.)
Pour déterminer la perte ou la diminution de revenus affectant ses proches, il y a lieu de prendre comme élément de référence, le revenu annuel du foyer avant le dommage ayant entraîné le décès de la victime directe en tenant compte de la part d’autoconsommation de celle-ci et du salaire qui continue à être perçu par son conjoint (ou concubin) survivant.
En outre, il convient de réparer, au titre de ce poste, la perte ou la diminution de revenus subie par les proches de la victime directe, lorsqu’ils sont obligés d’assurer jusqu’au décès de celle-ci une présence constante et d’abandonner temporairement leur emploi.
En tout état de cause, la réparation de ce chef de préjudice ne saurait conduire le proche de la victime directe à bénéficier d’une double indemnisation à la fois au titre de l’indemnisation de ce poste et de celle qu’il pourrait également percevoir au titre de l’assistance par une tierce personne, s’il décidait de remplir cette fonction auprès de la victime. Dans ce cas, il conviendra de déduire cette dernière indemnité de celle à laquelle il pourra prétendre au titre de l’indemnisation du présent poste.
Frais divers des proches (F.D.)
b) Préjudices extra-patrimoniaux
Préjudice d’accompagnement (P.AC.)
Ce poste de préjudice a pour objet d’indemniser les bouleversements que le décès de la victime directe entraîne sur le mode de vie de ses proches au quotidien.
Le préjudice d’accompagnement traduit les troubles dans les conditions d’existence d’un proche, qui partageait habituellement une communauté de vie effective avec la personne décédée à la suite du dommage.
[ préjudice moral*] Terme désignant le préjudice d’affection en cas de décès de la victime directe. Voir Préjudice d’Affection (P.AF.).
Préjudice d’affection (P.AF.)
2°) Préjudices des victimes indirectes en cas de survie de la victime directe
a) Préjudices patrimoniaux
Pertes de revenus des proches (P.R.)
Dans ce cas, il y a lieu de prendre comme élément de référence, le préjudice annuel du foyer avant le dommage ayant entraîné son handicap en tenant compte de la part d’autoconsommation de la victime directe et du salaire qui continue à être perçu par son conjoint (ou son concubin).
En outre, il convient de réparer au titre de ce poste, la perte ou la diminution de revenus subie par les proches de la victime directe lorsqu’ils sont obligés, pour assurer une présence constante auprès de la victime handicapée d’abandonner temporairement, voire définitivement, leur emploi.
En tout état de cause, la réparation de ce chef de préjudice ne saurait conduire le proche de la victime directe à bénéficier d’une double indemnisation à la fois au titre de l’indemnisation de ce poste et de celle qu’il pourrait également percevoir au titre de l’assistance par une tierce personne, s’il décidait de remplir cette fonction auprès de la victime. Dans ce cas, il conviendra de déduire cette dernière indemnité de celle à laquelle il pourra prétendre au titre de l’indemnisation du présent poste.
Frais divers des proches (F.D.)
Ces frais peuvent être conséquents dans le domaine des transports, notamment si la victime directe séjourne dans un établissement éloigné de la résidence de sa famille qui vient la voir régulièrement. Les proches sont, dans ce cas, amenés à exposer non seulement des frais de transport, mais aussi des frais de repas – ou même de courts séjours – à l’extérieur de la résidence habituelle de la victime.
b) Préjudices extra-patrimoniaux
Préjudice d’affection (P.AF.)
[ préjudice moral*] Terme désignant le préjudice d’affection en cas de décès de la victime directe. Voir Préjudice d’Affection (P.AF.).
Préjudices extra-patrimoniaux exceptionnels (P.EX.)
Ce poste de préjudice a pour objet d’indemniser les bouleversements que la survie douloureuse de la victime directe entraîne sur le mode de vie de ses proches au quotidien.
Ce préjudice de changement dans les conditions d’existence indemnise les troubles ressentis par un proche de la victime directe, qui partage habituellement une communauté de vie effective avec la personne handicapée à la suite du dommage, que ce soit à domicile ou par de fréquentes visites en milieu hospitalier.
Il convient d’inclure au titre de ce poste de préjudice le retentissement sexuel vécu par le conjoint ou le concubin à la suite du handicap subi par la victime directe pendant la maladie traumatique et après sa consolidation.